Dossier 360 | La période d'essai
Entreprises
Paroles d'Experts
Aujourd’hui, nous interrogeons Baptiste Azaïs, DRH du groupe Linking Talents, sur ses conseils et méthodes pour optimiser l’intégration d’un nouveau salarié. Tour d’horizon du suivi de la période d’essai, avec des leviers simples et efficaces pour faire de cette étape un succès.
Bonjour Baptiste ! Peux-tu te présenter et revenir sur ton parcours ?
Je suis Baptiste Azaïs, Directeur des Ressources Humaines du groupe Linking Talents, cabinet de recrutement multi-spécialisé. J’ai commencé ma carrière dans le marketing, j’ai notamment travaillé chez Unilever et Heineken. C’est au fil de mon parcours et de ces différents changements d’entreprise que j’ai eu un déclic. J’ai réalisé à quel point la culture d’entreprise peut avoir un impact profond sur l’engagement et la performance des collaborateurs, et, notamment, sur leur qualité de vie au travail. Trop souvent, ce sujet est sous-estimé, alors qu’il est en réalité à la base de tout : quand la culture est bien structurée et drivée pour la performance c’est toute l’organisation qui s’en porte mieux. Ce constat m’a donné envie de m’investir pleinement dans les Ressources Humaines.
Nous abordons aujourd’hui avec toi le sujet du suivi de la période d'essai. Pourquoi est-il essentiel de structurer un vrai processus de suivi pendant cette période, et que risque-t-on à négliger cette phase ?
La période d’essai est une étape clé dans une embauche et dans le processus d’intégration. Elle permet à l’entreprise et au salarié de tester leur compatibilité, dans un cadre à la fois structuré et souple.
C’est une phase d’observation bilatérale. Le salarié vérifie si le poste, l’environnement, les valeurs et la culture d’entreprise lui conviennent. L’entreprise, elle, s’assure que les compétences du collaborateur sont bien au rendez-vous et qu’il s’intègre bien dans l’équipe.
D’après les données récentes, environ 21 % des périodes d’essai en CDI sont rompues : 13 % à l’initiative de l’employeur et 8 % à celle du salarié. C’est 6 points de plus qu’avant le COVID (15%).
Les ruptures de période d’essai sont, à mon sens, inévitables. Par sa nature même, la période d’essai a pour objectif de vérifier qu’une collaboration fructueuse est possible entre l’entreprise et le salarié : et c’est dans le quotidien que l’adéquation entre les parties se révèle véritablement. L’objectif reste néanmoins de minimiser leur fréquence, chaque rupture représentant un coût significatif pour l’entreprise : temps consacré à la formation, désorganisation, perte d’efficacité et d’énergie, ainsi que des efforts de management.
Ce qui est le plus problématique, c’est lorsqu’une rupture de période d’essai est vécue comme une surprise. Cela révèle un manque de transparence et de communication en amont. Un bon processus de suivi fixe des repères, donne de la visibilité et du feedback, et permet surtout, sous réserve notamment des compétences et de l’envie du collaborateur, de lui donner une chance réelle de réussir. Laisser quelqu’un avancer seul pendant cette période, c’est risquer de passer à côté d’un profil à fort potentiel.
En matière de communication, quelles sont les bonnes pratiques à adopter pour que le collaborateur se sente écouté, compris et accompagné dès ses premières semaines ?
Tout commence par une communication claire, honnête et continue. Lors du premier jour — et même avant (lors de l’entretien d’embauche) — il faut poser les bases : expliquer la culture d’entreprise, les attentes, les outils et codes internes.
L’onboarding est donc central. Il doit être structuré autour de plusieurs piliers : l’accueil par les équipes, la formation aux outils, la présentation des projets, mais aussi un échange clair sur ce que l’on attend du salarié, et l’attribution éventuelle d’un parrain.
Ensuite, on organise des check-ins réguliers. Ces points permettent de faire un bilan, d’aborder ce qui va, ce qui pose question, et surtout d’identifier les axes d’amélioration. Le salarié doit comprendre le fonctionnement global de l’entreprise et se sentir soutenu. Il est tout aussi important de recueillir l’avis du collaborateur sur sa période d’essai : son ressenti, comment il vit sa prise de poste, s’il se sent à l’aise, s’il a des interrogations.
Quels outils simples mais efficaces recommandes-tu pour évaluer les compétences d’un collaborateur ? As-tu des exemples d’évaluation de période d'essai ?
Nous avons mis en place chez Linking Talents une grille d’évaluation des compétences, utilisée par les managers pour structurer les retours. Elle combine des critères de savoir-faire (maîtrise des outils, exécution des missions) et de savoir-être (communication, posture, esprit d’équipe…). Cette grille est visuelle, avec un système de couleurs, ce qui la rend intuitive. Elle donne au manager un repère objectif, et au salarié un outil de projection.
L’important, c’est de trouver le bon rythme : assez fréquent pour créer une dynamique, mais pas trop pour ne pas alourdir l’organisation. Ce suivi régulier, mais léger, permet d’ancrer la relation manager-salarié dans une logique de progrès.
Quel rôle doivent jouer les managers de proximité dans le bon déroulement d’une période d’essai, et comment les RH peuvent-ils les soutenir efficacement ?
Les managers sont les acteurs principaux du suivi opérationnel. Ce sont eux qui observent le collaborateur au quotidien, qui peuvent ajuster le cap, alerter ou encourager. Leur rôle est fondamental.
Cependant, il y a des écueils à éviter :
- Une erreur fréquente des néo-managers est de surprotéger leur N-1 en période d’essai, par crainte d’être tenus eux-mêmes responsables ou jugés en cas d’échec.
- Ensuite, ne pas oser dire les choses. Par peur de blesser, on reporte des retours importants ou des conversations à affronter. Mais cela empêche toute amélioration.
- Enfin, oublier de demander l’avis du collaborateur sur sa période d’essai : est-ce qu’il se sent à sa place ? Est-ce qu’il se projette dans le projet ?
Les RH peuvent jouer un rôle de soutien et de cadrage : accompagner les managers, aider à prendre du recul, à poser les bons diagnostics, et à structurer leur prise de décision. Chez nous, les points RH sont planifiés à 2, 4 et 6 mois, avec des bilans hebdomadaires sur les projets en cours. Ce rythme permet un bon équilibre entre pilotage et autonomie.
Quels indicateurs ou retours qualitatifs utilises-tu pour ajuster les pratiques RH ?
Nous utilisons certains outils pour ajuster nos pratiques. Le premier que nous avons mis en place, c’est un questionnaire d’onboarding intitulé « Les 100 premiers jours ». Il permet aux nouveaux collaborateurs de partager anonymement leur ressenti sur leur intégration, leur relation avec leur manager, et les points d’amélioration possibles. C’est une mine d’informations.
Le second indicateur, plus quantitatif, c’est le taux de validation des périodes d’essai, à comparer à la moyenne nationale (en fonction du secteur et de la taille de la société). C’est un très bon baromètre qui permet d’ajuster ses modes de fonctionnement.
En conclusion, penses-tu qu’un bon suivi auprès de l’employeur ainsi que du collaborateur permet de rendre certaines ruptures évitables ?
Absolument. Un bon suivi permet de créer les conditions de la réussite. En étant clair sur les attentes, en fournissant un accompagnement constant, on donne au collaborateur toutes les chances de réussir. Et surtout, on évite les malentendus et les surprises.
Cela dit, il faut aussi accepter que certaines ruptures soient inévitables. Il peut y avoir des décalages de culture, des difficultés de projection, ou tout simplement un manque d’alignement sur les valeurs. Il ne faut pas viser le 0 % de rupture, car cela signifierait qu’on ne prend plus aucun risque à mon sens. Et le risque peut emmener de belles surprises. Ce qui compte, c’est de faire les bons ajustements, d’assumer les décisions, et de respecter les deux parties dans la relation.
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Merci à Baptiste pour ses conseils et retours d’expérience !
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